Tribune publiée dans Le Plus L’Obs
New York City, NY. Ouf, on respire ! Les intentions de vote en faveur de Barack Obama augmentent de nouveau selon les sondages et, dans le camp démocrate, on reprend espoir.
Aux États-Unis, où je suis régulièrement, la campagne présidentielle bat son plein. Il reste encore deux grosses semaines et, comme le disait avant le deuxième débat Jon Stewart, le présentateur vedette du cultissime « Daily Show », « For the love of God, make it stop » (pour l’amour de Dieu, qu’on en finisse ! »).
Saturation ?
Il faut dire que la couverture médiatique est dense, les meetings et les opérations de communication s’enchaînent, ainsi que les débats et les multiples analyses qu’ils suscitent ensuite sur les chaînes d’information en continu. Contrairement à la France, ici on se confronte à de multiples reprises : après le premier débat et celui entre les deux candidats à la vice-présidence Joe Biden et Paul Ryan jeudi 11 octobre, a eu lieu un deuxième débat entre Obama et Romney, mardi 16 octobre, et le dernier débat a eu lieu ce lundi soir.
De plus, les publicités (payantes) sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus offensives, marquant ainsi la dernière accélération du sprint final. Aux États-Unis, pas d’égalité de temps de parole, la bataille médiatique se gagne aussi par centaines de millions de dollars dans un système de levées de fonds encore plus incontrôlé que dans le passé. Les partisans d’Obama ne sont pas en reste pour capitaliser agressivement sur l’avantage repris par leur champion sur le challenger.
Un des thèmes qui s’est imposé ces dernières semaines dans la bataille des « swing votes » (votes-clés) est l’égalité de droit des femmes. Si les USA ont été un des pays pionniers en la matière, paradoxalement, la cause des femmes a encore beaucoup de progrès à faire aux États-Unis. Cependant, Obama avance petit à petit sur le sujet et sa conception semble juste. Peut-être parce qu’il a lui même deux filles qu’il souhaite voir débuter dans la vie sur un pied d’égalité avec les cinq fils de Mitt Romney ?
Faux pas
Ce dernier semble avoir une conception relativement passéiste du rôle de la femme dans la société, et la tournure plutôt maladroite employée durant le débat en a été une belle illustration : ses « classeurs plein de femmes » (« Binders full of Women« , au lieu de « classeurs pleins de CV de femmes ») ont remporté un fier succès dans les médias satiriques américains, ainsi que sur le net où, dès le soir du débat, circulaient déjà des pages Facebook, des tumblrs dédiés et autres joyeusetés du web !
Aux dires des sondages, c’est Obama qui a remporté le deuxième débat, mieux adapté par son format à son tempérament : le « town hall« , c’est-à-dire l’échange avec des électeurs. Si le fond reste essentiellement le même, au niveau de la forme, ce dernier débat s’apparentait à un véritable combat de boxe, avec deux candidats tenaces et déterminés.
Combat de boxe
Contrairement au premier débat, Obama était bel et bien présent, avait du répondant et surtout s’est physiquement impliqué. Il s’est levé, s’est rapproché de son adversaire, aspects que les commentateurs média ont mis en avant, faisant le parallèle avec le débat Bush père-Clinton en 1992.
Et comme finalement pour tous les événements sportifs aux États-Unis, ce débat était retransmis dans des bars et on pouvait suivre les échanges accompagné d’une bonne bière et des cris des supporters ! Pas forcément idéal pour suivre le fond du débat, mais les « Cheer-ings » et les « Boo-ings » donnaient une bonne idée de l’orientation du bar. À New York bien sûr, beaucoup plus de « cheer-ings » pour Obama…
Et comme pour tout match, des « drinkings games » aux règles créées spécialement pour l’occasion circulaient sur le net, pointant avec ironie les tics de langages et points-clés de la campagne.
Eh oui, aux États-Unis, tout est prétexte à « l’entertainment« , même si on est bien conscient que les enjeux sont majeurs.
Lundi soir, retour au format classique avec les deux candidats fixés derrière leur pupitre et des questions posées par un journaliste, sur le thème des affaires étrangères. Sujet source de positions idéologiques très divergentes qui touchent au cœur de la conception que l’Amérique a d’elle-même comme première puissance mondiale. Sujet aussi très technique qui peut vite lasser l’électeur indécis et le conduire à préférer la forme au fond. Un dernier débat qui était à haut risque donc pour Obama.