Je suis élue PS : la guerre Copé-Fillon prive l’Assemblée d’une opposition crédible

Tribune publiée dans Le Plus L’Obs

Trop occupés à gérer la guerre intestine de leur parti depuis maintenant deux semaines, les députés UMP brillent par leur absence dans les travaux de l’Assemblée nationale.

Le feuilleton politico-médiatique à rebondissements, des diverses déclarations victorieuses aux ultimatums incessants, en passant par les médiations ratées, a pu prêter à sourire dans un premier temps, personne ne le niera. Après avoir fustigé longuement le Parti socialiste lors du très mauvais Congrès de Reims en 2008, l’UMP affiche aujourd’hui un visage désastreux, entre triches affligeantes et invectives accablantes.

Cependant, le nombrilisme de la droite atteint un niveau inquiétant quand la représentation nationale est mise en cause. C’est devant des bancs désertés par la droite de l’hémicycle que le président de la République italienne est venu délivrer un message d’amitié le 21 novembre dernier. Aussi, lors de la séance de nuit pour la deuxième lecture du projet de Loi de financement de la Sécurité sociale, on pouvait compter les députés UMP sur les doigts d’une main.

Des absences remarquées

Au quotidien, ce sont des disparitions soudaines ou des conciliabules et querelles à mi-voix en commissions, des sièges vides en séances publiques, un désintérêt affiché pour les auditions, y compris pour celles concernant l’ouverture du mariage aux couples de même sexe et alors même que l’opposition accuse la majorité d’avoir confisqué le débat sur ce sujet de société majeur. Quand ils se décident enfin à prendre la parole, c’est devant les caméras, généralement pour parler d’eux-mêmes, occasionnellement pour parler de l’actualité législative, mais dans ce cas préférant les débats sur les débats aux discussions sur le fond.

La rupture entre les députés du groupe UMP et du R-UMP est consommée.

Mais je me questionne – et tous les citoyens français sont en droit de le faire – sur les motivations politiques de cette scission et sur l’instrumentalisation des institutions de la République. La constitution d’un groupe politique à part entière, donnant droit à des financements publics pour des élus qui avaient été candidats sous une autre étiquette il y a à peine quelques mois et à des collaborateurs de groupe payés en partie par l’Assemblée nationale, pose question.

L’utilisation des temps de parole au parlement pour afficher des affiliations personnelles plus que des divergences politiques laisse perplexe. L’intérêt de la France paraît bien loin face à ces considérations partisanes ! La démocratie y perd beaucoup, l’image de tous les grands partis en ressort abîmée, pendant que l’extrême-droite recrute.

Une opposition crédible est nécessaire

Cette débâcle n’est pas dans l’intérêt de nos compatriotes, ni même du Parti socialiste. Une opposition crédible est nécessaire pour la bonne santé de la démocratie. Les électeurs de la droite ont également le droit d’entendre leurs idées défendues et de savoir que les députés pour lesquels ils ont voté les représentent. Désormais, les droits spécifiques réservés aux groupes minoritaires (postes dans les bureaux de commission, missions d’information ou d’enquête, temps de parole) sont donc éclatés entre ces factions. Pourtant, l’opposition se doit de représenter une possible alternance politique, essence même du pluralisme politique.

Nous souhaitons débattre du pacte croissance compétitivité et emploi, de la mobilisation générale contre le décrochage scolaire, de la transition énergétique, de la réforme du mariage et de la filiation pour l’égalité des droits. Ce sont sur les réformes proposées et à venir que nous attendons des critiques et des propositions. Nous avons, en tant que députés, la responsabilité majeure de porter nos ambitions, à travers le débat parlementaire et le vote des lois, pour l’avenir de la France et de tous nos concitoyens.

Désormais, le risque est que l’UMP ne remplisse plus du tout son rôle d’opposition. Si la droite républicaine continuait à se déchirer à coup de combats des chefs, la majorité pourra certes avancer plus vite dans son travail législatif. Mais, privée de contradiction politique construite et de débats de fond, la qualité du travail accompli s’en ressentira, au détriment de tous, sauf des partis extrémistes.