Tribune publiée dans Figaro Vox
La France s’est longtemps enorgueillie de sa politique d’intégration. Force est de constater qu’après 30 ans, elle a abouti à ce qu’elle était sensée combattre: le repli communautariste.
La crise d’identité traverse toutes les couches de la société touchées par les inégalités, pas seulement les populations issues de l’immigration. La montée du FN est aussi partiellement une forme de repli communautariste de ceux qui croient au concept fallacieux des «Français de souche».
Ayant été longtemps immigrée dans un grand pays d’immigration, les Etats-Unis, ma perception d’une intégration réussie a changé. Dans ce pays, l’affirmation d’une appartenance à une communauté va de pair avec un patriotisme très fort. Il nous faut regarder de près cet apparent paradoxe.
D’abord, aux Etats-Unis, la politique de visas est claire, et est conçue pour mener à la citoyenneté. C’est un droit, pas un trophée. En France à l’inverse, le système semble être conçu pour décourager ceux qui veulent devenir français.
Ensuite, sans minimiser les risques de dérives, cessons de confondre communauté et communautarisme. La France encourage et facilite l’organisation des communautés de Français à l’étranger, pourquoi alors avons-nous peur de l’organisation de communautés d’étrangers en France? Une communauté, c’est d’abord un cercle de solidarité qui peut être un facteur important d’intégration, à condition de développer des politiques éducatives, culturelles, sociales et économiques qui s’appuient sur ces communautés au lieu de les stigmatiser.
Ayant grandi dans le métissage réunionnais, je sais aussi qu’il n’y a aucune contradiction entre multiculturalisme et citoyenneté française. La France est de plus en plus métissée, le nombre de plurinationaux ne cesse d’augmenter. A droite et à l’extrême droite, on utilise ces statistiques pour faire peur.
Nous, socialistes, devons assumer nos valeurs internationalistes pour célébrer sans retenue la diversité, l’ouverture sur le monde et l’enrichissement culturel qui en découle comme constitutifs de l’identité française et de la citoyenneté européenne.
Accéder à l’enseignement de langues et cultures étrangères dès le plus jeune âge, avoir la possibilité de vivre quelque temps à l’étranger, pour les uns c’est une excellente façon de s’approprier son propre multiculturalisme, sa propre plurinationalité, tout en appréciant d’autant plus son appartenance à la citoyenneté française. Pour les autres c’est une excellente façon de s’ouvrir au multiculturalisme sans y voir une menace pour la République.
Communauté, multiculturalisme, plurinationalité: intégrons ces mots dans le vocabulaire de la citoyenneté française.