Ma réaction à l’affaire « Charlie Hebdo »

C’est avec un certain effarement que je regarde depuis hier la polémique qui enfle autour des caricatures du prophète Mahomet publiées par Charlie Hebdo, tant le débat a pris une tournure caricaturale, appelant de manière abusive chacun à « choisir son camp », pour ou contre le journal, pour ou contre les caricatures et par extension pour ou contre le phénomène religieux.

Je regrette personnellement le choix par Charlie Hebdo d’un timing bien malheureux : publier ces dessins au moment même où un film clairement anti-islam enflamme une bonne partie des pays de traditions musulmanes, et où des diplomates et des expatriés occidentaux craignent pour leur sécurité n’était sans doute pas la plus brillante des idées. La sécurité de nos ambassades, consulats et écoles a dû être renforcée dans certains pays en raison de représailles possibles contre la France. Défendre la totale liberté de la presse demande en contrepartie de pouvoir avoir confiance en une presse consciente de son devoir d’exercer cette liberté avec un esprit de responsabilité républicaine et citoyenne. Le choix éditorial de Charlie Hebdo dans le contexte actuel rend plus difficile le travail des parlementaires qui comme moi sont toujours prêts à s’engager pour les libertés publiques.

Mais le politique n’a pas à dicter sa conduite à la presse, et la France doit rester ferme sur ses valeurs et ne pas douter du bien-fondé de son combat pour la liberté d’expression et la laïcité.

Que la tradition anticléricale qui fait partie de l’ADN de Charlie Hebdo et qui égratigne souvent violemment toutes les religions puisse choquer les croyants, c’est parfaitement compréhensible. Que certains, en revanche, puissent imaginer le retour du délit de blasphème est extrêmement dangereux.

La France est le pays des Lumières et des droits de l’Homme. La lutte contre l’obscurantisme et la liberté de chacun passent par la liberté de s’exprimer, de critiquer, de caricaturer. Nous ne devons pas craindre de réaffirmer nos convictions en la matière. La République ne doit pas reculer d’un millimètre devant les extrémismes de tous bords.